Le 3 décembre 2019, l’Insee a publié la première évaluation du crédit d’impôt innovation (CII) depuis son lancement en 2013. Cette étude démontre que les PME bénéficiaires du CII sont plus dynamiques que les non bénéficiaires sur plusieurs points. Nous avons récapitulé les points clés à connaître.
Un impact positif sur la croissance des PME bénéficiaires
Le crédit d’impôt innovation a été instauré pour aider les PME à lancer de nouveaux produits sur le marché, dans l’objectif d’accélérer leur croissance. Dans son évaluation, l’Insee (en collaboration avec la DGE) a souhaité vérifier si ces objectifs ont bien été remplis sur la période allant de 2013 à 2016. Il s’avère que le crédit d’impôt innovation incite effectivement les PME à « se lancer dans un processus d’innovation », augmentant ainsi leur probabilité de déposer des brevets et le nombre de nouveaux produits fabriqués, qui sont « substantiellement différents » par rapport aux PME qui ne bénéficient pas du CII. La croissance au sens large des bénéficiaires du CII est également favorisée.
Au-delà de la dimension innovante des entreprises bénéficiaires du CII, les auteurs de l’étude constatent une hausse du nombre d’emplois (notamment techniques) mais une baisse du salaire moyen après 2 ans de crédit d’impôt innovation. Dans les faits, 93% des dépenses du CII sont consacrées au personnel. Le bilan total des sociétés augmente également dès la première année de déclaration de CII, au même titre que leur chiffre d’affaires. Le taux d’investissement des bénéficiaires du CII, quant à lui, ne se différencie pas des PME non bénéficiaires car ces sociétés cherchent plutôt à recruter.
Les auteurs de l’évaluation considèrent que les petites entreprises réalisent peu d’investissements matériels en général, par opposition avec les ETI qui investissent beaucoup plus. Ces retombées positives sont en partie dues à l’intervention de cabinets de conseil en financements publics.
Le rôle des cabinets de conseil dans le succès du Crédit d’impôt innovation
Un certain nombre d’entreprises implantées en France font appel à des prestataires extérieurs pour monter leurs dossiers d’aides publiques. Cette démarche s’explique par le fait que l’obtention d’aides suppose de connaître tous les dispositifs, de choisir le(s) bon(s) financements en les optimisant entre eux puis de rédiger, et suivre les dossiers. Or ce processus est chronophage et demande parfois des compétences spécifiques. Dans son évaluation, l’Insee a souligné l’intérêt des cabinets de conseil dans le cadre du crédit d’impôt innovation.
Pour les PME qui étaient déjà suivies par un cabinet de conseil pour leur crédit d’impôt recherche, l’Insee a observé que celles-ci se sont naturellement orientées vers le crédit d’impôt innovation. En effet, disposer d’un prestataire extérieur pour les aides publiques permet d’obtenir les bonnes informations rapidement et de simplifier les démarches. Ainsi, les entreprises déjà accompagnées ont pu déclarer du crédit d’impôt innovation dès son lancement en 2013. Il existe notamment un référencement des acteurs du conseil en CIR-CII créé par le Médiateur des entreprises pour faire connaître les cabinets compétents et fiables. Beaucoup d’autres PME françaises pourraient bénéficier du CII mais ne le savent pas, ou ignorent l’existence de prestataires spécialisés dans l’obtention d’aides publiques pour les entreprises. La peur du contrôle fiscal est également un frein à la déclaration de crédits d’impôt, ce qui empêche de déclencher des opportunités de croissance. Mais qui sont ces entreprises qui récoltent les fruits du Crédit d’impôt innovation ?
Le profil des bénéficiaires du crédit d’impôt innovation
Les données récoltées par l’Insee et la DGE permettent de brosser un premier portrait des bénéficiaires du CII. Nous avons repris les chiffres clés de l’évaluation dans une infographie :
Ces données ne concernent que l’année 2014, mais nous donnent déjà des indications sur le profil des bénéficiaires du crédit d’impôt innovation. L’évaluation nous apprend également que 58% des bénéficiaires ont un excédent brut d’exploitation positif et 87% dégagent une valeur ajoutée positive. En 2013, le crédit d’impôt innovation a bénéficié à 4092 entreprises pour 83 millions d’euros de créance d’impôt, soit en moyenne 20 000 euros par entreprise. En 2014, le montant total du CII a augmenté de 40%, et le nombre de bénéficiaires de 29%, mais le montant moyen n’a augmenté que de 12%. Or les montants perçus par les bénéficiaires pourraient être plus élevés.
Le montant du crédit d’impôt innovation est plafonné à 400 000€ par an et par entreprise, à un taux de 20% des dépenses éligibles (design, démonstrateurs, nouveaux process, etc…). En 2014, les bénéficiaires ont déclaré en moyenne 120 000€ de dépenses d’innovation. C’est ainsi que seuls 4% des bénéficiaires atteignent les 400 000€ de dépenses éligibles car un projet de ce montant est très conséquent pour une PME. Bien souvent, les sociétés bénéficient à la fois du CII et du CIR.
Selon l’étude de l’Insee, 57% des bénéficiaires du CII déclarent du CIR, mais ces sociétés sont plus grandes que celles qui ne déclarent que du CII. Le crédit d’impôt innovation est en réalité un « sous-produit » du crédit d’impôt recherche, puisqu’il finance la phase de développement des projets innovants (alors que le CIR s’intéresse aux activités de R&D en amont du projet). Ces deux dispositifs sont donc complémentaires et cumulables. L’introduction du CII a simplement répondu aux besoins des petites entreprises.
À la suite de la mise en place du CII, une baisse des dépenses de recherche déclarées dans le CIR a été observée car jusqu’à lors, les PME incluaient leurs dépenses d’innovation dans le CIR alors que celles-ci n’étaient pas éligibles (ce qui pouvait entraîner des redressements en cas de contrôle fiscal). De fait, le crédit d’impôt recherche intéresse plutôt les grandes entreprises qui réalisent plus de R&D que les PME. Une confusion persiste néanmoins entre la R&D et l’innovation.